Nouveauté du catalogue Kurokawa de cette fin d’année, Père Fouettard Corporation (Black Night Parade au Japon) est la dernière oeuvre en date de Hikaru Nakamura, mangaka essentiellement connue chez nous pour Les Vacances de Jésus et Bouddha. L’auteur nous y montre qu’elle maîtrise toujours aussi bien l’humour décalé, faisant de ce manga une des très bonnes surprises de ce mois de décembre.

Hikaru Nakamura semble décidément avoir un faible pour tout ce qui touche les mythes de manière générale. Après s’être attaqué aux religions dans Les Vacances de Jésus et Bouddha, c’est désormais au tour du mythe Père Noël de se voir revisité par la mangaka. Le titre vous aura certes déjà donné une bonne indication sur la teneur du manga, mais n’espérez pas vous retrouver plongé dans une ambiance de Noel féerique et digne d’une vitrine de grand magasin au mois de décembre. Dans Père Fouettard Corporation, Hikaru Nakamura nous livre une lecture à la fois sombre et caustique de cette fête devenue pour beaucoup plus commerciale qu’autre chose. Mais sans oublier d’enrober le tout d’un humour omniprésent.

Oubliez le bedonnant bonhomme en rouge et ses petits lutins souriant créant les jouets préférés des enfants dans son usine du Pole-Nord. De toute façon, le Père Noël a disparu et seul subsiste l’activité du Père Fouettard. Ici, tout est fabriqué à la chaîne par des « vauriens » ayant été traînés de force afin d’expier leurs mauvaises actions. Les listes de Noël ? Inutiles, un système d’espionnage est mis en place au mépris de la vie privé pour connaître le cadeau le plus adapté à chacun. Enfin le plus adapté… pour les décevoir ! Car telle est en fait la mission du Père Fouettard : faire atteindre aux enfants n’ayant pas été sages un taux d’insatisfaction déterminé en fonction de leur comportement. Et plutôt que de priver totalement l’enfant de cadeaux, tout l’exercice va consister à lui offrir quelque chose proche de son souhait mais tombant tout de même à côté. Si durant votre enfance vous souhaitiez une Playstation et que vous avez fini avec une Xbox (ou vice-versa hein), ne cherchez pas plus loin, c’était un coup du Père Fouettard. Pour trouver le cadeau « parfait », il existe une machine permettant de simuler l’ouverture des cadeaux et de mesurer le taux d’insatisfaction de l’enfant en fonction de ce qu’il reçoit. Une tâche à laquelle va être assignée Nakamura, honnête homme dans la galère qui va se retrouver à travailler dans l’usine après avoir récupéré un invendu dans la supérette où il enchaîne les petits boulots.

pere-fouettard-manga-tome-1

Caustique, sarcastique, on ne peut pas dire que le Noël dépeint par Hikaru Nakamura soit franchement enchanteur. Le manga est également parsemé de passages dramatiques, notamment quand le passé de certains personnages est abordé, mais ceux-ci sont toujours traités avec beaucoup de subtilité afin de ne jamais tomber dans le pathos. Car malgré le ton grinçant, malgré les drames, Père Fouettard Corporation reste avant tout une oeuvre remplie d’humour grouillant de situations improbables et de gags en tout genre. Un aspect comique mis en valeur par l’emphase faite sur les expressions faciales des personnages, volontairement exagérées face aux situations toujours plus loufoques qui se passent devant leurs yeux.

On finira en s’attardant un instant sur l’édition en elle-même. Comme toujours chez Kurokawa, nous avons droit à un bel objet avec du papier de qualité et une impression du même acabit. La traduction est également de bonne facture avec un travail d’adaptation de certains termes ou expressions assez remarquable. Bref, que ce soit au niveau de la forme ou du fond, Père Fouettard Corporation est un vrai cadeau de Noël.

 


Synopsis

Au Japon, c’est la crise. Pas facile d’avoir un boulot quand on n’a pas de diplôme. Miharu Hino, 22 ans et abonné aux CDD pourris, en sait quelque chose.
Et le Père Fouettard, vous connaissez ? Celui qui se balade à Noël avec un fouet et un grand sac pour y plonger les vauriens. Miharu s’apprête à faire sa connaissance. Bien loin d’être un affreux moutard, notre héros se retrouve malgré lui au fond du sac du père Fouettard, en route pour le pôle Nord ! Il y découvre le véritable visage de Noël, plus proche d’une multinationale peu scrupuleuse que d’un atelier coquet.
La petite entreprise du Père Fouettard ne connaît pas la crise.

Père Fouettard Corporation est édité chez Kurokawa et est vendu au prix de 7,65€.

Critique réalisée à partir d’un exemplaire fourni par l’éditeur.