Manga signé Keiko Suenobu, Limit met en scène un groupe de lycéennes confrontées à une situation extrême : la survie en pleine forêt après un accident de bus qui a décimé leur classe. Comptant six tomes au total, ce thriller psychologique explore les limites de la nature humaine, les rapports de force entre les personnages et les conséquences de leurs choix.
Il suffit de se laisser porter par le courant pour vivre sa vie sans souci. Telle est la philosophie de Mizuki. Amie proche de Sakura, la reine du lycée, elle fait partie des élèves “populaires” de son école, et participe aux brimades que font subir ses copines à leurs camarades pour préserver son statut social et sa tranquillité. Mais son petit monde s’écroule le jour où, au cours d’un voyage scolaire, toute sa classe est victime d’un accident tragique qui coûte la vie à la majorité des élèves. Perdue en pleine forêt sans aucune ressource, Mizuki va devoir composer avec les autres survivantes si elle veut espérer survivre jusqu’à l’arrivée des secours…
Limit est édité chez Pika Edition et est vendu au prix de 7,20€.
Critique réalisée à partir d’un exemplaire fourni par l’éditeur.
Née en 1979 à Kitakyûshû, Keiko Suenobu est connue pour dépeindre la réalité des adolescents japonais, qui sont confrontés à la pression sociale, à la solitude, au mal-être, en abordant des thèmes difficiles et sensibles dans ses œuvres comme le harcèlement scolaire. En 2001 déjà, Vitamine, son premier one-shot traitait des violences scolaires et ses œuvres suivantes se sont toujours inscrites dans cette lignée. En 2006, elle a reçu le Prix du manga Kôdansha dans la catégorie shōjo pour Life, un de ses plus grand succès qui connu une adaptation en drama elle aussi plébiscité par la critique. Sorti trois ans plus tard, Limit reprend la formule habituelle du mangaka. Celle d’utiliser le genre du shōjo, qui s’adresse principalement aux jeunes filles, pour proposer une vision originale de thématiques sociétales particulièrement lourdes. Sauf que cette fois, l’auteur a décidé de rajouter un nouveau genre à son mélange, celui de la survie.
Le premier tome de Limit pose les bases du scénario : Mizuki, une élève populaire qui suit le courant sans se poser de questions, part en voyage scolaire avec sa classe. Elle est amie avec Sakura, la reine du lycée, qui règne sur les autres élèves avec son charisme et sa beauté. Mizuki participe aux brimades que Sakura et ses acolytes font subir aux élèves moins populaires, notamment Arisa Morishige, une fille ronde et complexée. Mais le voyage tourne au cauchemar lorsque le bus qui transporte la classe tombe dans un ravin. La plupart des élèves meurent sur le coup, dont Sakura. Mizuki se réveille dans les décombres, blessée et choquée. Elle découvre qu’elle n’est pas la seule survivante et que parmi les rescapés se trouve Arisa, qui va pouvoir se libérer de ce carcan dans cette situation extrême. Isolés en pleine forêt, sans aucun moyen de communication ni aucune ressource, les survivants vont alors s’organiser pour survivre, en attendant les secours qui tardent à venir.
En jouant avec les codes du survival, le scénario de Limit plonge les personnages dans une situation de crise qui révèle leur véritable personnalité. Les masques tombent, les secrets sont dévoilés, les tensions montent. Le lecteur suit avec angoisse les péripéties des différents protagonistes qui doivent assurer leur survie mais également faire face à leurs propres démons. A travers ces survivantes, Limit porte également regard critique sur la société japonaise, dénonçant un système scolaire favorisant la compétition, la conformité et l’exclusion. Le manga dépeint sans concession la hiérarchie pyramidale propre au microcosme scolaire et ses conséquences en terme d’harcèlement. Tout un système remis en cause suite à cet accident, faisant confronter les anciennes « leaders » à des dilemmes moraux les obligeant à remettre en question leurs valeurs et leurs principes.
Le mélange des genres traités par Keiko Suenobu se retrouve également dans son dessin. Elégant et soigné, le dessin respecte les codes du shôjo en mettant en scène des personnages aux traits fins et aux yeux grands. On retrouve également cette prédominance des décors minimalistes avec de nombreuses cases au fond blanc, permettant de faire l’emphase sur les expressions faciales avec de nombreux plans resserrés. Mais en jouant avec les contrastes entre le beau et le laid, le doux et le dur, le clair et le sombre, la mangaka arrive à créer une atmosphère à la fois poétique mais également oppressante, qui captive le lecteur.
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