Visual novel sorti à l’origine sur Xbox 360 en 2009, Steins;Gate fait son grand retour sur PlayStation 4 et Nintendo Switch avec Steins;Gate Elite, une version totalement refaite du jeu où les graphismes d’origine ont laissé place à des extraits de son adaptation en série anime.

Ce test de Steins;Gate Elite a été réalisé sur une version PlayStation 4 fournie par l’éditeur.

Savoureux mélange entre roman, animation et jeu vidéo, le visual novel est un genre unique qui ne peut laisser personne indifférent. Pour les plus verbeux, le genre peut s’apparenter à expérience enivrante où un récit composé uniquement de textes prendrait vie devant leurs yeux à l’aide de musiques, bruitages, de doublages et d’une dose plus ou moins poussée d’interactions. Pour les plus gamers, passer des dizaines d’heures à voir défiler des lignes de textes sans rien n’avoir d’autre à faire qu’à presser un bouton à l’occasion pourra s’avérer un non-sens total pour ce qui est tout de même un « jeu » vidéo ainsi qu’une source profonde d’ennui. Fort heureusement pour ces derniers, les visual novels accouchent régulièrement de véritables perles de narration bénéficiant par la suite d’adaptation en série anime, permettant ainsi de profiter pleinement de l’histoire sans avoir l’impression de regarder un roman photo semi-interactif. On pourra citer par exemple Higurashi no Naku Koro ni, jeu amateur sorti sur PC en 2002 avant de se voir décliné en série anime en 2006, mais également Steins;Gate, visual novel sorti sur Xbox 360 en 2009 et dont le studio White Fox a réalisé une adaptation en anime en 2011.

steins gate elite

Le meilleur des deux mondes

Dans un esprit de synthèse que n’aurait pas renié François Hollande, 5pb nous propose de revivre avec Steins;Gate Elite l’aventure du jeu d’origine mais en remplaçant les plans fixes d’époques par des extraits tirés directement de la série anime. Dix ans après sa sortie initiale, le jeu s’en retrouve totalement transfiguré en arrivant à concentrer le meilleur des deux versions de son histoire. Beaucoup plus beau et surtout incroyablement plus vivant qu’en 2009, Steins;Gate Elite s’avère également beaucoup plus riche que la série anime en reprenant tel quel les très nombreuses pensées du personnage principal que l’on ne retrouve que dans le visual novel.

Loin d’être superflus, tous ces textes sont un plus non négligeable pour profiter au mieux de cette histoire aussi complexe que diablement passionnante. Pour ceux qui ne le sauraient pas, Steins;Gate est en fait inspiré d’une histoire « vraie » (notez bien les guillemets) remontant au début des années 2000. Entre octobre 2000 à mars 2001, une personne se faisant appeler John Titor a en effet posté plusieurs messages sur des forums internet en prétendant qu’il serait un voyageur temporel en provenance de l’année 2036. Si la véracité des propos tenus par John Titor n’est évidemment pas vérifiée, celui-ci a réussi à fournir certaines prévisions troublantes ayant réussi à semer le doute dans l’esprit de certains. Soldat pour le compte du gouvernement, il aurait également fait un bond temporel dans les années 70 afin de récupérer un ordinateur IBM 5100, seule machine à même de surmonter un bug UNIX touchant les machines en 2038. Dans Steins;Gate, John Titor et l’IBM 5100, renommé IBN 5100 sont les pièces centrales du récit mais seul un certain Rintarô Okabe semble se rappeler l’existence de ce voyageur temporel, toutes les informations le concernant ayant été totalement rayée d’internet et lui-même ne se rappelant pas avoir visité le début des années 2000. La raison ? Une modification de la ligne temporelle en raison d’un simple message envoyé par hasard dans le passé par ce même Rintarô Okabe.

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El Psy Kongroo

Jeune scientifique atteint de chûnibyô, un terme pouvant être traduit par « maladie du collégien de 2ème année » et désignant une personne ayant des délires mégalomanes, Rintarô Okabe a en effet réussi à transformer sans le vouloir son four à micro-ondes en une machine à remonter dans le temps lui permettant notamment d’envoyer des SMS dans le passé. Une découverte qui va être le début de gros, vraiment très gros ennuis pour celui qui se décrit lui-même comme un « scientifique fou ». Pourchassé par une organisation souhaitant lui voler son invention, trimbalé dans d’innombrables lignes temporelles en raison de « l’effet papillon » engendré par ses modifications même minimes du passé, Rintaro Okabe va devoir arriver à remettre l’ordre temporel en place, tout en sauvant sa peau et celle de ses proches, sans pouvoir pour autant compter totalement sur ces derniers, lui seul gardant en mémoire les faits survenus dans les autres dimensions.

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Passionnante, complexe, enivrante, l’histoire permet également au joueur d’interagir avec elle au moyen du téléphone portable du jeune scientifique. Une interaction certes limitée, celle-ci se limitant à choisir entre différentes réponses aux SMS reçus, mais qui pourra déboucher sur différentes fins en fonction des choix effectués. Un élément de gameplay certes rudimentaire qui permet au joueur de se sentir impliqué dans le récit même si on peine à déceler les conséquences découlant de nos messages, ceux-ci étant la plupart du temps bien futiles.

Sauter dans le temps en ligne droite

Irréprochable dans sa forme et délicieux dans son fond, Steins;Gate Elite pèche cependant par une narration bien linéaire alors que le concept même de voyage temporel aurait pu ouvrir la porte à bien plus de folie. Si l’histoire propose bien son lot de bonds dans le passé et de modifications des lignes temporelles, celle-ci se déroule simplement en ligne droite et on se contente finalement de suivre un récit allant d’un point A à un point Z sans pouvoir en dévier. Une narration bien classique qui tranche totalement avec un 428 : Shibuya Scramble qui permet au joueur de tester divers embranchements et de refaire une nouvelle fois les événements passés à l’aide d’un arbre chronologique.

Paradoxalement, cette alliance entre le jeu vidéo et la série anime risquera de poser un cas de conscience à certains. En reprenant des pans entiers de la série pour l’intégrer au visual novel, Steins;Gate Elite apparaît certes comme une version ultime du jeu de 2009, à la fois magnifique et terriblement vivante. Mais d’un autre côté, ceux ayant fait la connaissance de la licence avec l’anime pourront avoir l’étrange impression de le regarder une nouvelle fois mais avec un rythme bien plus lent et haché. Certes, le jeu se révèle beaucoup plus détaillé que la série en permettant par exemple de se plonger dans la myriade de message posté sur le forum internet, mais l’impression de regarder une version low-cost de l’anime pourra en perturber certains. A vous de voir si vous préférez la fluidité du récit à l’abondance de détails et à la possibilité d’influer sur la conclusion de l’histoire, sachant que la présence de sous-titres uniquement en anglais pourra poser de belles difficultés pour ceux ne maîtrisant pas la langue de Shakespeare.