Première œuvre de Yûto Inukai à sortir en France, Tokyo Cannabis nous plonge dans le quotidien de Sento Morio, fleuriste plongé bien malgré lui dans la culture de cannabis. Si ce genre d’intrigue n’est plus si originales depuis une certaine série américaine bien connue, son adaptation dans le contexte japonais le reste cependant (enfin presque).


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Passionné d’horticulture, Sento Morio, un père de famille de 42 ans, tient sa propre boutique de fleurs. Dépassé par la situation financière difficile du magasin, Morio n’a d’autre choix que de se lancer dans la culture d’une plante plus rentable… le cannabis. Poussé par son ami Kagayama, Morio accepte à contre-coeur de devenir un cultivateur de l’ombre. N’abandonnant cependant pas son amour pour les plantes, il se donne pour objectif de créer le meilleur cannabis du Japon. Entre conflits de gangs et enquêtes de la police, ses journées ne seront pas de tout repos…

Tokyo Cannabis est édité chez Kana et est vendu au prix de 7,70€.

Critique réalisée à partir d’un exemplaire fourni par l’éditeur.


Le cannabis est une plante qui suscite la controverse dans le monde entier. Certains pays l’ont légalisé, d’autres le tolèrent, mais au Japon, il s’agit d’un tabou absolu. La loi sur le contrôle du cannabis, instaurée en 1948 sous l’occupation américaine, punit sévèrement toute possession, consommation ou culture de cette plante. La peine encourue pour les contrevenants peut monter jusqu’à cinq ans de prison selon les cas, avec ostracisation et excuses publiques à la télévision pour les célébrités même en cas d’infime quantités décelées. Quant aux étrangers, l’expulsion du pays n’est jamais bien loin. Pourtant, le cannabis a une longue histoire au Japon, où il était autrefois cultivé pour ses usages textiles, médicinaux et rituels.

C’est dans ce contexte que se déroule Tokyo Cannabis, manga signé Yûto Inai et publié en France aux éditions Kana. Ce thriller, prépublié au Japon dans le magazine Comic Zenon depuis 2021et qui compte actuellement cinq volumes, raconte l’histoire de Morio Chitô, un horticulteur passionné qui tient une boutique de fleurs avec sa femme et sa fille. Mais les affaires ne sont pas florissantes, et Morio peine à joindre les deux bouts. C’est alors que son ami Kagayama, un ancien camarade de lycée, lui propose de se lancer dans un business plus lucratif : la culture du cannabis. Morio, réticent au début, finit par accepter, poussé par la nécessité et la curiosité. Il se donne pour objectif de créer le meilleur cannabis du Japon en utilisant ses connaissances botaniques et son amour des plantes. Mais il va vite se rendre compte que son activité n’est pas sans risques, et qu’il va devoir affronter la police, les gangs, et sa propre conscience.

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Pour nous offrir ce manga, l’auteur, Yûto Inai, s’est documenté sur la législation, l’histoire et la culture du cannabis au Japon, et il nous livre un récit à la fois réaliste et captivant. Loin de faire l’apologie du cannabis, Tokyo Cannabis n’en fait pas non plus la diabolisation et adopte plutôt une approche nuancée, qui invite à la réflexion et au débat. Il nous plonge dans le quotidien d’un homme ordinaire, qui bascule dans le crime par désespoir et qui se retrouve confronté à un monde impitoyable. Un postulat de base qui rappelle un peu Breaking Bad, mais surtout Jumbo Max, manga sorti l’an dernier chez Pika Edition racontant comment un banal pharmacien va se transformer, plus ou moins malgré lui, en baron de la drogue.

Le dessin de Yûto Inai est à la hauteur du scénario. Il est réaliste, précis, expressif, il rend bien compte de l’atmosphère tendue et oppressante du récit et met en valeur aussi bien les personnages que les décors. Le mangaka sait également jouer avec les contrastes et les ombres afin d’emphaser les effets de suspense et de dramatisation. Mais il sait également mettre en valeur la beauté et la diversité des plantes, notamment du cannabis, dont Morio est un véritable artiste. Le manga bénéficie également d’un bon découpage, qui alterne les plans larges et les gros plans, les scènes d’action et les scènes plus intimistes, les dialogues et les silences.

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