Publié depuis 2017 dans Shônen Jump+, le magazine au format numérique édité par Shueisha, Route End est la première série majeure de Kaiji Nakagawa, un mangaka dont l’expérience se limitait jusqu’à présent à deux one-shots.

Un personnage principal dont le métier est de nettoyer les scènes de crimes en raison de la décomposition des cadavres. Des corps démembrés puis mis en scène de manière morbide. Quel que soit le sens dans lequel on le prend, Route End possède tous les codes du manga seinen. Et pourtant, le manga est bel est bien traité comme étant un shônen au Japon, comme en atteste sa prépublication dans les pages (façon de parler) du magazine numérique Shônen Jump+, une publication habituée à des œuvres généralement plus consensuelles comme Last Pretender ou encore Black Torch. Un style que Kaiji Nakagawa semble affectionner, l’auteur s’étant déjà initié au thriller il y a quelques années avec Remain Bad, un polar où l’on retrouve éléments de Route End avec un tueur en série et des héros au passé tourmenté.

Depuis le suicide de sa mère quand il était encore enfant, Taiji Haruno n’a jamais pu effacer le traumatisme découlant de la vision du corps de celle qui l’a élevé pendant au bout d’une corde et, peut-être le plus marquant pour lui, qu’elle ai décidé de passer à l’acte comme si l’existence de son fils lui importait peu. Depuis, le jeune homme vit au quotidien au contact de la mort en travaillant pour une société de nettoyage un peu particulière, chargée de nettoyer les lieux de scènes de crimes marqués par les traces de cadavres plus ou mois décomposés. Un travail que certains trouveraient ingrat, mais qui permet à Taiji de canaliser ses démons du passé et de mettre de l’ordre dans son esprit, comme il l’explique lui-même. Son quotidien va toutefois basculer quand une scène de crime bien particulière va être confié à Aum, la société pour laquelle il travaille. Victime d’un mystérieux tueur en série, la victime a été découpée en morceaux avant que ceux-ci ne soient méticuleusement disposés afin de représenter le mot « END ». Plus troublant, un squelette a également été découvert sous les lattes du parquet. Des lattes changés il y a plusieurs années par Kôji Tachibana, patron de Aum et véritable figure paternelle pour Taiji, à l’occasion du nettoyage d’une précédente scène de crime dans les même lieux…

route end tome 1 extrait

ROUTE END © 2017 by Kaiji Nakagawa / SHUEISHA

En tant que thriller, Route End rempli déjà avec brio sa part du contrat avec son ambiance pesante et son scénario attisant la curiosité du lecteur en multipliant les mystères comme le passé de Taji, le rôle de son patron dans ces homicides, la signification de cette mise en scène macabre ou encore le mystérieux squelette retrouvé sur les lieux du crime… Très bien rythmé, le manga est très agréable à parcourir et sait garder son lecteur en haleine soulevant tout autant de mystères qu’il fournit d’éléments de réponses au fil des pages. Au contraire de « The Isolator » qui perdait trop facilement son lecteur en introduisant de manière chaotique les bases de son univers, Route End bénéficie ainsi du talent narratif de Kaiji Nakagawa pour profiter d’un cadre parfaitement installé dès le premier volume.

Au delà de ça, Route End invite également le lecteur à se pencher sur les rapports que chacun des protagonistes ont avec la mort. Que ce soit directement, par un drame familial, ou indirectement, en raison de leur travail, tous sont confrontés de différentes manière à l’oeuvre de la grande faucheuse et l’expriment de manière différentes. Des plus classiques, comme Taiji, aux plus excentriques, comme ses collègues qui…. On vous laisse découvrir. Ce rapport à la mort, présent en filigrane durant tout ce tome, apporte une autre dimension à Route End, plus psychologique, et permet par la même occasion de développer beaucoup plus d’empathie pour les personnages et de se lier d’affection pour eux. De quoi compenser amplement un dessin plutôt inégal des personnages, même si de manière général le mangaka livre une oeuvre plutôt soignée.

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route end tome 1

Synopsis

Taji travaille pour une entreprise de nettoyage spécialisée dans les cadavres en décomposition. Les macchabées découverts sur le tard laissent des traces insupportables pour le commun des mortels, mais lui a le cœur bien accroché. La mort, il la connaît depuis l’enfance. Il a vu le corps de sa mère se balancer au bout d’une corde. Le traumatisme lié à ce suicide est ancré en lui, et chaque nettoyage est une catharsis. Son quotidien est bouleversé quand son quartier devient le théâtre de meurtres en série. Les victimes sont découpées en morceaux, puis alignées pour former un mot, le même à chaque fois : “END”. Taji est chargé du nettoyage de la dernière scène de crime en date. L’affaire prend une tournure personnelle pour lui lorsqu’il découvre que son patron, véritable figure paternelle, est peut-être impliqué dans ces morbides mises en scène…

Route End est édité chez Ki-oon et est vendu au prix de 7,90€.

Critique réalisée à partir d’un exemplaire fourni par l’éditeur.